Le Fort de Cascastel
L’ancien Castrum de Cascastel était en fort mauvais état à lépoque de la Guerre de cent Ans (1337-1453) alors que l’un des deux châteaux seigneuriaux possédait un mur neuf. En 1390, la décision fut prise à la demande des Seigneurs , à savoir l’Abbé de Lagrasse, Raymond de Castel et Sicart de Cascastel,et des Habitants représentès par leurs Consuls, de reconstruire l’ancien fort.
Les débats solennels eurent lieu sur la Place Publique, devant le Commissaire du Roi, qui concéda l’autorisation royale de construire et d’édifier.
Ces événements furent consignés dans une Charte dont le texte sur parchemin est parvenu jusqu’à nous.
Voir La Charte du Fort de Cascastel
L’emprise de l’ancien Castrum demeure tout à fait lisible aujourd’hui, elle correspond au Quartier dit du « Bureau » -de Poste-.
Son entrée, au Sud, se situe sur l’ancienne place publique et forme encore une « couverte ». Elle est désignée en 1390 sous le nom de « Portail Vieux ». La rue du bureau forme un axe Nord-Sud à l’intérieur du fort.
Elle conduit au « Portail d’eau » de la Charte, qui permettait aux habitants du Fort d’accéder à la rivière.
De la rue du Bureau, il faut remonter pour accéder à une rue qui appartenait aux propriétaires du Château jusqu’en 1966.
Au temps de la Charte, cette rue est un fossé qui sépare le Fort du Château de Sicart de Cascastel .
A gauche subsiste la muraille médiévale du Château, à droite les habitations du Fort.
Au fond, un accès vers le Pont de Pierre à été percé.
< La rue du Pont Vieux en 1916 Photo famille Olivier-Raynaud
En 1916, la rue est encore réservée aux habitants du Château.
Une construction sous les arcades limite le passage et dissimule l’exutoire des eaux de cet ancien fossé, toujours en service.
Le niveau du sol remonte vers la terrasse du Château.
Les extraits de la Charte ci-dessous sont empruntés à la traduction réalisée par Yvette Carbonell-Lamothe, in « Fortifier une frontière ».
« Item, il est convenu qu’entre les Châteaux des dit seigneurs, il doit y avoir douze pams et entre les maisons et le mur du Château, tout autour quand les maisons se feront. »
Une lisse d’environ trois mètres était réservée entre les Châteaux et les maisons, entre les maisons et le rempart du fort pour les besoins de la défense. Les maisons construites le long de la rivière natamment ont annexé cet espace, et se sont appuyées contre le rempart.
« Item, la muraille doit avoir cinq cannes de haut, merlons inclus, et avoir d’épaisseur toute la muraille quatre pams environ. »
On estime aujourd’hui que la muraille devait avoir dix mètres de haut pour un mètre d’épaisseur.
« Item que les fossés anciens soient réparés pour convenir à la dite fortification, comme ils étaitent autrefois. »
C’est à peu prés tout ce que nous saurons sur le fort précédent. Il n’y a pas de modification de l’emprise dans la charte.
On reconstruit un ouvrage probablement très ancien. Cascastel se situe à un point stratégique sur les antiques routes des mines.
Ci-dessous: Reproduction d’un plan cadastral de 1839 (Archives Départementales de l’Aude) permettant de bien identifier,l’Eglise en bleu, le Château qui lui fait face et le Fort autour du Château.
Item, à l’angle de la maison de Raymond Peyre (Sud) se fera une tour d’angle qui fera saillie hors du mur, comme le savent Raymond de Castel et Sicart, et le Maître qui fera la fortification. »
L’emprise d’une tour à gorge(S/O) est encore visible sur le plan de 1839.
« Item que le portail vieux soit réparé à la volonté des seigneurs et du maître d’oeuvre des tours à faire.
Item à l’ancien portail se fera une barbacane et un pont levis à la volonté des dits seigneurs. »
Le « portail vieux » se situait au Sud-Est, prés de la place publique.
Le bâtiment de l’ancienne poste qui fait angle près de l’ancien portail abrite un four en pierres, héritier probable de l’ancien four banal. »
« Item à l’angle de Jean Donadieu se fera une tour carrée à la volonté des dits seigneurs et du maitre d’oeuvre »
Cette tour, à l’angle Sud-Est du Castrum, fait partie d’une maison,son parement médièval est intact, côté Nord. (3)
Le Fort et le Château n’étaient distants que de trois mètres, par contre l’Eglise avec l’ancien cimetière, forme un enclos séparé.
Les Abbés de Lagrasse premiers seigneurs du lieu disposaient d’un domaine distinct de celui des seigneurs laïques, Eglise et Condamines rive droite.
« … de la part des co-seigneurs et des syndics de la communauté du dit lieu de Cascastel,… a été signifié par eux à la communauté du dit lieu, qu’il était nécessaire pour l’utilité de la chose publique d’agrandir la fortification qu’ils ont, dans laquelle tous les gens du dit lieu, en même temps que leurs animaux gros et petits et les autres biens puissent se réfugier et se protèger en sûreté des gens d’armes qui traversent journellement leurs terres et les lieux circumvoisins allant au Royaume d’Aragon et de même en revenant, et puissent leur résister… »
Le Fort était un lieu de refuge contre les « gens d’armes » qui étaient en l’espèce, des mercenaires Aragonais employés à la guerre de cent ans,quand on livrait bataille et vivant de rapines quand ils étaient sans emploi. Les Corbières médièvales étaient riches de leur miel, de la viande et de la laine fine de leurs brebis , du fer de leurs mines (outils, armes).
Le Fort n’était pas destiné à soutenir un siège mais à se protéger contre les brigands. Ce Fort protégeait les personnes et leurs moyens de subsistance, mais aussi leur capacité à payer l’impôt et les droits seigneuriaux. L’autorisation de construire et d’édifier a donc été consentie dans des formes solennelles et actée sur un beau parchemin.
Selon la même charte, le dit Fort aurait été construit en trois ans entre 1390 et 1393. Les vestiges les plus visibles, outre l’emprise, se situent le long de la rivière, mur médiéval à parements, tour carrée en saillie incluse dans une maison.
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